Un premier extrait du livre "L'arbre dehors"
Prologue
La chambre est sombre, éclairée seulement par la lumière distante du cabinet de toilette dont on a laissé la porte grande ouverte. Assise tout près du lit, une jeune fille penchée en avant sur sa chaise, les coudes en appui sur les genoux. Elle est rousse, toute jeune, c’est Marie. Ses cheveux courts allument des reflets de brique dans la pénombre. A sa blouse blanche, on reconnaît une soignante tout entière tendue vers le lit. Elle semble épier, immobile dans le bruit formidable d’une respiration harassante, amplifiée par la nuit. Le souffle est pénible, roule en lui des monceaux de rocaille aux arêtes vives, un souffle bruyant, effrayant comme un effort inutile, douloureux bien au-delà de la douleur.
D’un geste hésitant et peureux, la jeune fille tend sa main vers celle de la malade, allonge timidement son index dans un mouvement bref qu’elle suspend à mi-chemin, comme alarmée soudain de sa propre audace. Dans un soupir elle se redresse sur sa chaise, s’assied toute droite, le regard un instant accroché à la fenêtre noire qui luit, glacée dans la pénombre.
Puis brusquement le silence afflue, il envahit d’un coup l’espace déjà restreint de la petite pièce. Marie, d’abord apaisée par cette accalmie, sursaute soudain et très vite sur ses pieds se penche de nouveau sur sa patiente. Elle l’appelle à mi-voix avec dans son chuchotement le ton d’une urgence contenue :
- Madame Jasca ? Madame Jasca ? Vous m’entendez dites ?
Un autre extrait prochainement...